Comment produire de l’électricité grâce à la géothermie ?
La géothermie est une source d'énergie renouvelable qui utilise la chaleur naturelle de la Terre pour produire de l'électricité. Cet article explore les différentes méthodes de production d'électricité géothermique, leurs principes de fonctionnement et leur potentiel en France. Les centrales géothermiques flash nécessitent des températures élevées et ont une puissance moyenne typique de 15 à 50 MW.
Les bases théoriques de la géothermie
La géothermie, source d'énergie renouvelable prometteuse, repose sur l'exploitation de la chaleur naturellement présente dans le sous-sol terrestre. Cette chaleur provient principalement de la désintégration des éléments radioactifs contenus dans les roches et du noyau terrestre. Comprendre les bases théoriques de la géothermie permet d'appréhender son potentiel pour la production d'électricité et de chaleur.
Sources de chaleur terrestre
La Terre génère continuellement de la chaleur en son sein, principalement due à deux phénomènes :
La désintégration radioactive des éléments comme l'uranium, le thorium et le potassium présents dans la croûte et le manteau terrestre
La chaleur résiduelle de la formation de la Terre, il y a environ 4,5 milliards d'années
Cette chaleur se propage lentement vers la surface par conduction à travers les roches et par convection dans les fluides souterrains. Le flux géothermique moyen à la surface du globe est d'environ 65 mW/m², avec des variations importantes selon les régions géologiques.
Gradient géothermique
Le gradient géothermique représente l'augmentation de la température avec la profondeur. En moyenne, il est de 3°C par 100 mètres de profondeur, mais il peut varier considérablement selon les contextes géologiques :
Type de zone
Gradient géothermique
Zones tectoniquement stables
2-3°C/100m
Zones volcaniques actives
Jusqu'à 30°C/100m
Ces variations s'expliquent par la structure de la croûte terrestre, la présence de sources de chaleur locales ou la circulation de fluides chauds.
Types de géothermie
On distingue généralement trois catégories de géothermie, selon la température des ressources :
Géothermie basse énergie
Température inférieure à 90°C. Utilisée principalement pour le chauffage direct et les applications agricoles ou industrielles. Les aquifères peu profonds (moins de 2 000 m) sont exploités.
Géothermie moyenne énergie
Température entre 90°C et 150°C. Permet la production d'électricité via des cycles binaires (ORC - Organic Rankine Cycle). Les ressources se trouvent généralement entre 2 000 et 4 000 m de profondeur.
Géothermie haute énergie
Température supérieure à 150°C. Idéale pour la production d'électricité par turbine à vapeur. Ces ressources sont typiquement situées dans des zones volcaniques ou tectoniquement actives, à des profondeurs variables.
Captage et utilisation de la chaleur géothermique
L'exploitation de la géothermie pour la production d'électricité nécessite des techniques adaptées selon le type de ressource :
Forages profonds pour atteindre les aquifères chauds ou les roches chaudes
Systèmes de pompage pour extraire les fluides géothermaux
Échangeurs de chaleur pour transférer l'énergie thermique
Turbines et générateurs pour convertir la chaleur en électricité
Dans le cas de la géothermie haute énergie, la vapeur extraite peut directement alimenter une turbine. Pour la géothermie moyenne énergie, on utilise un fluide intermédiaire dans un cycle binaire. Ces techniques permettent de valoriser efficacement la chaleur terrestre pour produire une électricité renouvelable et peu émettrice de CO2.
Les centrales géothermiques flash
Les centrales géothermiques flash représentent une technologie éprouvée pour produire de l'électricité à partir de la chaleur terrestre. Elles exploitent des réservoirs géothermiques à haute température, généralement situés dans des zones volcaniques actives, pour générer de la vapeur et alimenter des turbines.
Principe de fonctionnement
Dans une centrale flash, on fore des puits profonds pour atteindre les réservoirs d'eau chaude sous pression, à des températures comprises entre 180°C et 350°C. Lors de sa remontée dans le puits de production, l'eau géothermale subit une détente qui provoque sa vaporisation partielle. Le mélange eau-vapeur ainsi obtenu est dirigé vers un séparateur-sécheur.
Rôle du séparateur-sécheur
Cet équipement clé sépare la phase liquide de la phase vapeur par gravité. La vapeur, plus légère, s'élève vers le haut du séparateur tandis que l'eau s'accumule au fond. La vapeur est ensuite acheminée vers la turbine, alors que l'eau est généralement réinjectée dans le réservoir géothermal pour maintenir la pression et prolonger la durée de vie du gisement.
Production d'électricité
La vapeur sèche issue du séparateur est envoyée dans une turbine à vapeur couplée à un alternateur. En se détendant, la vapeur fait tourner les aubes de la turbine, entraînant la rotation de l'alternateur qui produit ainsi de l'électricité. À la sortie de la turbine, la vapeur détendue est condensée puis réinjectée avec l'eau séparée dans le réservoir géothermique.
Caractéristiques techniques
Les centrales flash nécessitent des températures élevées, supérieures à 180°C, pour fonctionner efficacement. La pression du fluide géothermal à l'entrée du séparateur est typiquement comprise entre 5 et 10 bars. La puissance électrique moyenne de ces installations varie de 15 à 50 MW, bien que certaines unités puissent atteindre 110 MW.
Infrastructure et durée de vie
Une centrale flash comprend généralement plusieurs puits de production et de réinjection, un ou plusieurs séparateurs, des conduites de vapeur, une ou plusieurs turbines, des condenseurs, des tours de refroidissement et un poste de transformation électrique. La durée de vie d'une telle installation est estimée entre 30 et 50 ans, avec un renouvellement périodique de certains équipements comme les pompes de puits. Le maintien de la productivité du réservoir géothermal sur le long terme nécessite une gestion rigoureuse, notamment par la réinjection des fluides et le forage de nouveaux puits si nécessaire.
Les centrales ORC et leur fonctionnement
Les centrales géothermiques à cycle organique de Rankine (ORC) représentent une technologie innovante pour produire de l'électricité à partir de ressources géothermiques de moyenne température. Ce type de centrale permet d'exploiter efficacement des gisements dont la température est comprise entre 110°C et 150°C, élargissant ainsi le potentiel de production électrique géothermique.
Principe de fonctionnement des centrales ORC
Dans une centrale ORC, le fluide géothermal n'est pas directement utilisé pour actionner la turbine. Il cède sa chaleur à un fluide organique intermédiaire via un échangeur thermique. Ce fluide organique, généralement un hydrocarbure ou un réfrigérant, possède un point d'ébullition plus bas que l'eau, ce qui permet de vaporiser et détendre efficacement le fluide secondaire même avec des températures géothermales modérées.
Le cycle de fonctionnement d'une centrale ORC se décompose en plusieurs étapes :
Le fluide géothermal chaud (110-150°C) est pompé depuis le réservoir souterrain
Il traverse l'échangeur de chaleur où il réchauffe le fluide organique du circuit secondaire
Le fluide organique se vaporise et se détend dans une turbine couplée à un alternateur
La vapeur détendue est condensée puis pompée à nouveau vers l'échangeur
Le fluide géothermal refroidi est réinjecté dans le sous-sol
Avantages des centrales ORC
Cette technologie présente plusieurs atouts :
Exploitation de ressources géothermiques de moyenne température
Rendement élevé grâce à l'utilisation d'un fluide organique adapté
Fonctionnement en circuit fermé limitant les pertes
Maintenance réduite par rapport aux centrales à vapeur directe
Possibilité de cogénération chaleur/électricité
Cogénération et applications
Les centrales ORC offrent l'opportunité de valoriser la chaleur résiduelle en sortie de turbine. Cette chaleur peut alimenter des réseaux de chaleur urbains ou des processus industriels, optimisant ainsi le rendement global de l'installation. Par exemple, la centrale de Soultz-sous-Forêts en Alsace, d'une puissance de 1,7 MWe, produit également 70°C de chaleur pour des applications locales.
Performances typiques
Les centrales ORC géothermiques affichent généralement des puissances comprises entre 1 et 20 MWe. Leur rendement électrique se situe entre 10% et 15%, mais peut atteindre 80% en cogénération. La durée de vie d'une telle installation est estimée à 20-30 ans, avec des coûts d'exploitation relativement faibles une fois l'investissement initial réalisé.
Exemples et potentialités de la géothermie en France
La géothermie offre un potentiel intéressant pour la production d'électricité en France, notamment dans les territoires d'outre-mer. Bien que son développement soit encore limité sur le territoire métropolitain, plusieurs projets existants ou en cours démontrent les possibilités de cette énergie renouvelable.
La centrale de Bouillante en Guadeloupe
L'exemple le plus emblématique de production d'électricité géothermique en France se trouve en Guadeloupe, avec la centrale de Bouillante. Mise en service en 1986, cette installation exploite un réservoir géothermique à haute température situé à proximité d'une zone volcanique active. La centrale comprend deux unités de production :
Bouillante 1 : 4,5 MW de puissance installée
Bouillante 2 : 11 MW de puissance installée
En 2019, la centrale a produit 110 GWh d'électricité, ce qui représente environ 6% de la production électrique totale de l'île. Des projets d'extension sont à l'étude pour augmenter sa capacité à 45 MW d'ici 2025, ce qui permettrait de couvrir jusqu'à 20% des besoins en électricité de la Guadeloupe.
Le site pilote de Soultz-sous-Forêts en Alsace
En France métropolitaine, le site de Soultz-sous-Forêts en Alsace constitue un projet pionnier de géothermie profonde. Initialement conçu comme un centre de recherche en 2000, il est devenu un site industriel de production d'électricité en 2016. La centrale dispose d'une puissance installée de 1,7 MW et peut produire jusqu'à 12 GWh par an, soit l'équivalent de la consommation électrique d'environ 2 500 logements.
Perspectives de développement
Plusieurs autres projets de centrales géothermiques sont en cours de développement en France, notamment :
En Martinique : un projet de centrale de 10 MW est à l'étude dans la région de la Montagne Pelée
À La Réunion : des études sont menées pour évaluer le potentiel géothermique de l'île, avec des perspectives de développement à moyen terme
À Mayotte : des travaux d'exploration sont en cours pour identifier des ressources géothermiques exploitables
Objectifs de production
La Programmation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE) fixe des objectifs ambitieux pour le développement de la géothermie électrique en France, notamment dans les territoires d'outre-mer :
Territoire
Objectif 2023
Objectif 2028
Guadeloupe
45 MW
75 MW
Martinique
10 MW
40 MW
La Réunion
0 MW
10 MW
Ces objectifs ambitieux témoignent de la volonté des pouvoirs publics de développer cette filière énergétique renouvelable, qui présente l'avantage d'être disponible en continu, contrairement à d'autres énergies renouvelables intermittentes comme le solaire ou l'éolien.
La géothermie offre un potentiel considérable pour la production d'électricité en France. Avec le développement de nouvelles technologies comme les centrales ORC, cette source d'énergie renouvelable pourrait jouer un rôle croissant dans le mix électrique français. Des projets en cours visent à augmenter la part de la géothermie dans la production d'électricité nationale.
L’efficacité énergétique désigne la consommation moyenne d’un appareil, d’un ensemble d’équipements ou d’un système par rapport à la normale. Elle varie de la mention A à G en allant du plus performant au plus énergivore.
Performance énergétique
La performance énergétique désigne la quantité totale d’énergie qu’une habitation, un bâtiment commercial ou une usine consomme en une année. Elle s’associe étroitement à la notion d’efficacité énergétique et au DPE.
Rendement énergétique
Le rendement énergétique définit le rapport entre la qualité d’énergie produite avec la quantité d’énergie utilisée à l’origine. En raison des pertes d’énergie, il est toujours inférieur à 100% avec un coefficient qui varie de 0 à 1.